Aeroplans - Saab JAS-39 GripenL’avion suédois JAS-39 Gripen s’approche de plus en plus d’un tournant dans son histoire. En attendant de savoir si son fabricant Saab sera obligé ou non d’arrêter sa production, les affaires se multiplient autour du fleuron suédois. Partenaire dans la fabrication de l’avion de chasse, le groupe britannique BAE Systems a commencé son retrait de Saab. Du coup, c’est un nouveau pas que fait le Gripen en direction de son pays qui devient de plus en plus le seul garant de sa survie.

Développer la flotte suédoise actuelle.

Saab vient de recevoir une bonne nouvelle de la part du Försvarets materielverk (FMV), la DGA suédoise. Pendant quatre ans, l’industriel sera en charge de développer l’actuelle flotte de l’armée de l’air suédoise. Un contrat estimé à deux milliards de couronnes soit 205M€.

 

Aeroplans - Saab JAS-39 Gripen

Les capacités des Gripen C/D de l’armée de l’air suédoise sont constamment sujettes à des modifications ainsi qu’à des améliorations. Cette évolution continue assure ainsi à la flotte une progression constante qui se traduit cette fois-ci par une amélioration des systèmes de contre-mesures et de communication. De nouvelles armes feront également leur apparition et le radar verra sa portée allongée avec de nouvelles fonctionnalités.

Fort d’une expérience de 130 000 heures au sein des forces nationales, le Gripen suivra également un programme visant à réduire son coût d’exploitation. La plupart de ces travaux auront lieux à Linköping, Gothenburg, Järfälla, Kista et Arboga.

Un appareil engagé dans tous les appels d’offres en cours.

Malgré ce contrat avec la FMV, Saab ne pourra continuer à entretenir ses chaines de montage indéfiniment. Avec la récente décision du gouvernement suédois de réduire les achats de cet appareil, l’industriel doit trouver des débouchées à l’export au plus vite.

Le Gripen vole actuellement en Suède, en Afrique du Sud, en République tchèque et en Hongrie. La Thaïlande s’est également portée acquéreuse pour six exemplaires du chasseur JAS-39EBS qui seront livrés en 2011. Au-delà des clients actuels, plusieurs forces armées se sont montrées intéressées. À grand coup de rabais et d’échanges de technologiques, Saab met tout en œuvre pour remporter ces contrats, gages de la survie de son chasseur. Ainsi, le Gripen est dans la course pour le contrat MMRCA indien pour la vente de 126 avions. Au Brésil, le contrat F-X2 aurait pu être le bon pour Saab mais c'est finalement le Rafale de Dassault Aviation qui pourrait remporter la course. En Suisse par contre, le Gripen serait bien placé pour le remplacement des F-5 vieillissants.

Aeroplans - BAE Systems

Le retrait de BAE Systems n’augure rien de bon.

Saab est aujourd’hui un acteur incontournable sur le marché de l’armement mondial et s’impose avec des produits reconnus pour leur efficacité. Malgré les déboires du Gripen qui seraient un coup dur pour l’industriel en cas d’arrêt de la production, Saab est un groupe solide au fort potentiel. Mais la crise gronde du côté de son partenaire privé le plus important, le Britannique BAE Systems, par ailleurs engagé dans le programme Eurofighter.

Aeroplans - BAE SystemsLes deux compagnies se connaissent bien puisque lors de l’introduction de Saab en Bourse en 1998, BAE avait pris 35,1% de l’industriel, devenant ainsi son actionnaire majoritaire. Associés depuis plus de trois ans dans la construction du chasseur Gripen, les deux acteurs ont récolté les fruits de cette coentreprise devenue aujourd’hui incertaine.

Seulement, BAE subit de plus en plus d’attaques, notamment en provenance des États-Unis, et le groupe semble être dans l’obligation d’opérer un repli de plus en plus important. Ainsi, déjà en 2005 l'entreprise avait réduit sa participation au sein du groupe suédois à 20,5%. Le 5 mars de cette année, les Britanniques cédaient la moitié de leur participation. Une transaction de 103M€ pour que Saab redevienne un peu plus suédoise. En effet, c’est la société d’investissements de Stockholm, Investor AB qui rachètera les parts concernées alors qu’elle possède déjà 19,8% du fabricant. Le reste de la participation de BAE Systems sera placée sur le marché en « temps utile ».

Aeroplans - Saab JAS-39 Gripen

Pour une meilleure compréhension, nous rajouterons que Saab est une société distincte depuis 1989 de Saab Automobile, que General Motors vient de vendre au néerlandais Spyker.

Les mésaventures de BAE Systems aux Etats-Unis.

Mais au-delà des conséquences, somme toute assez minimes, pour l’industriel suédois, cette affaire continue d’inquiéter quant au futur du géant BAE Systems. Ce même jour, le groupe de Défense britannique a renoncé à acquérir son concurrent Mouchel, et du coup a accepté « d'échanger des informations » avec son rival Babcock. Mais au-delà, c’est aux États-Unis que le groupe semble être le plus en danger. BAE a près de 50% de ses activités dans ce pays.

Le feuilleton judiciaire continue pour les Britanniques outre-Atlantique. Impliqué Aeroplans - Saab JAS-39 Gripendans différents cas de fraudes, le groupe de Défense vient de se voir retirer temporairement le droit à toute licence d’exportation avec les États-Unis. Suite aux aveux de BAE sur certains cas, le Département d’État prend des mesures de précautions en attendant d’avoir étudié correctement cette affaire. Mais ce n’est pas là le plus inquiétant.

Les sommes concernées sont assez minimes comparées à d’autres affaires dans lesquels BAE était ou est impliqué. Mais au-delà du volet économique et judiciaire, le Département d’État pourrait profiter de l’occasion pour mettre la pression sur son allié anglais. Ainsi, bon nombre d’observateurs commencent à croire à une instrumentalisation de BAE Systems pour faire taire les voix montées de Londres critiquant l’attitude des États-Unis. Le dossier des Malouines n’est pas loin, d’autant plus que le gouvernement argentin recommence à affirmer son désir de reprendre le contrôle sur ces îles riches en pétrole.

L’attitude de Washington serait alors particulièrement dangereuse vis-à-vis de son allié européen le plus fidèle. Alors que le débat sur les récentes mesures protectionnistes font le plein autour de l’A330MRTT, les États-Unis pourraient à avoir à faire face à un nouveau scandale en Europe. Si le marché de l’armement est traditionnellement très feutré, inutile de préciser que ces dernières semaines apportent leur lot de nouvelles sensationnelles. Enfin, le choix de Londres de sélectionner General Dynamics pour la production de 750 véhicules blindés de reconnaissance au détriment de BAE Systems, qui comptait créer 10 000 emplois au Royaume-Uni, viendra sûrement alimenter la controverse.

Michael Colaone.