On se souvient des mots qu’avait eu Marcel Dassault au sujet du Rafale : « Le Rafale est promis à un bel avenir à l’exportation, car il n’aura aucun concurrent qu’il soit Russe ou Américain ». Aux vues du succès du chasseur français sur les marchés export, on est devenu prudent dans nos observations.
Sur le marché des avions civils dominé par Airbus puis par Boeing, les deux grands avionneurs voient une compétition se monter petit à petit. C919, CSeries et bien sûr Superjet 100, les concurrents vont bientôt prendre un envol remarqué sur les marchés. Alors que Bombardier vient de vendre 40 Cseries supplémentaires à Republic Airways ou que le C919 chinois a finalement choisi parmi les meilleurs moteurs du marché pour son avion qui ne sera surement pas un low-cost, Européens et Américains peinent à se mettre d’accord sur une approche efficace de ces nouveaux entrants. L’occasion pour nous de revenir aujourd’hui sur les retards que subissent les futurs Superjet 100 fabriqués par Sukhoï et sur le T-50.
Le Superjet 100 prend du retard.
Présenté lors du dernier salon du Bourget, le futur avion régional russe est un sérieux concurrent pour les deux mastodontes du marché que sont les A320 et B737. Attendu pour une mise en service en décembre dernier, sa certification russe et européenne n’est finalement pas attendue avant juillet prochain. Alors que la mise en production de série de l’appareil devait commencer dans la foulée, c’est un coup dur pour Sukhoï. Les premiers exemplaires du Superjet 100 (SSJ100) dans sa version 95B (95 places) devaient initialement avoir lieux en décembre 2009 en faveur d’Aeroflot et d’Armavia.
Or, c’est un retard dans la certification de son moteur le SaM146 qui retarderait autant la mise en activité de l’appareil. Fabriqué par le consortium franco-russe Powerjet, c’est du côté russe que le bât blesserait. Cette filiale commune à SNECMA et NPO Saturn ne serait en plus pas capable de livrer les moteurs destinés aux avions de série. Chez SNECMA, on affirme que le problème ne vient pas des équipes françaises. Le moteur a aujourd’hui effectué plus 5.800 heures d’essais. Mais c’est une nouvelle fois les difficultés financières du motoriste russe qui handicaperait l’entreprise. En attendant, le 4ème SSJ100 a volé pour la première fois le 4 février 2010 pour rejoindre les trois autres appareils de la campagne d'essais en vol.
NPO Saturn engagé entre autres dans la conception et la livraison du SaM146 connait depuis quelques années des difficultés économiques. La société aujourd’hui en pleine réorganisation pêche à la fois pour son manque de moyens financiers et humains. Pour le moment, le SSJ100 a été commandé à 122 exemplaires et en dehors des problèmes de certification liés au SaM146 les appareils sont prêts à être produits. Issu de la fusion de Rybinsk et de Lyul'ka-Saturn, le motoriste propulse depuis le temps de l’ex-Union Soviétique les appareils militaires et civils. Or la mise en service du SaM146 était annoncée comme un renouveau pour le motoriste. Fruit d’une nouvelle organisation de sa R&D et de sa production, le moteur doit donner un nouveau souffle pour une industrie russe qui compte sur la collaboration avec la France pour remonter la pente.
Les A320 et B737 vont être remotorisés.
En attendant l’orage, Airbus et Boeing vont doter de leurs fameux A320 et B737 de nouveaux moteurs. Écologiquement plus responsables et surtout affichant de meilleures performances, ces nouveaux moteurs dont nous parlions précédemment viendront donner une nouvelle dynamique à des avions déjà vieux de plusieurs décennies. Chez Boeing on semble plus inquiet de cette montée en puissance du SSJ100 et de ses camarades. La relève du B737 serait sur les planches à dessin depuis quelques mois déjà. Chez Airbus, on serait un peu plus en retrait avec des études allant d’une nouvelle génération d’A320 simple à une version à deux couloirs avec un fuselage élargi dont Airbus Toulouse se fait désormais une spécialité.
Le constructeur aéronautique russe Sukhoi ambitionne d'occuper à terme 15% à 17% du marché mondial des avions régionaux. Une concurrence sérieuse si ajoutée au CSeries, C919 et EMB190. Avec l’évolution des stratégies de transport au sein des compagnies aériennes, ces appareils pourraient se tailler une part de lion sur ce marché.
Même problème en vue pour le chasseur PAK-FA.
Alors que les critiques vont bon train qualifiant le chasseur de cinquième génération de Sukhoï de Raptor russe, le chasseur qui commence ses vols d’essai n’en a pas fini avec les déconvenues. En tout cas, c’est ce que laissent croire les motoristes russes impliqués dans le développement de son moteur. Pour l’instant, l’avion vole grâce à deux réacteurs AL-41F1 qui n’est rien d’autre qu’une évolution du AL-41F1S qui équipe les Su-35. Pour l’instant rien d’inquiétant, car ce compromis avait été trouvé depuis le départ entre Sukhoï et son motoriste. Ainsi, les premiers exemplaires de la série des PAK-FA seront livrés avec des réacteurs AL-41F1 développant une poussée de 14,7 tonnes chacun.
Mais voilà, pour le reste de la série un nouveau réacteur doit être développé pour succéder à l’AL-41F1. Un moteur plus puissant encore développant une poussée de 16 tonnes pour une masse plus faible et des coûts d’exploitation réduits. Or pour l’heure, aucun motoriste n’a encore été choisi. NPO Saturn et MMPP Saliout sont sur les rangs pour décrocher ce contrat. Un premier appel d’offres avait déjà était annulé en 2007.
Suivant le planning rendu public par Sukhoï, les essais constructeurs doivent durer jusqu’en 2012 pour obtenir ensuite sa qualification étatique. La production en série est attendue pour 2015. Un nouvel appel d’offres devrait avoir lieu dans deux ans pour savoir comment seront propulsés les futurs PAK-FA. Or, l’échec du premier appel d’offres met en lumière les difficultés rencontrées par les motoristes russes pour développer un réacteur de 16 tonnes. Si ces difficultés venaient à se prolonger, le « Raptorski » prendrait du plomb dans l’aile. D'aucuns parlent d’une dizaine d’années pour avoir un moteur répondant aux spécifications souhaitées pour le PAK-FA.
Michael Colaone.