Analyse-Pourquoi avoir recours à l'énergie solaire de l'espace ?
ASTRIUM est une filiale d'EADS, principal partenaire participant à la construction de la fusée Ariane, et fournit ce lanceur à Arianespace. Astrium, surfant sur la réussite grâce à son ingénierie et à sa technologie éprouvées dans le domaine spatial, est aussi une des plus importantes sociétés constructrices de satellites et s'apprête à conquérir un nouveau domaine, celui de l'énergie solaire spatiale fournie à la Terre à partir de satellites véritables centrales solaires de l'espace.
ASTRIUM rejoint en cela les autres grandes industries spatiales planétaires aux USA et notamment au Japon, où un projet qui devrait voir le jour en 2030 est élaboré par l'agence spatiale japonaise, la JAXA, avec ses partenaires Mitsubishi et IHI.
Mais ASTRIUM met les " boosters " - ce qui est plus que naturel pour une société experte en propulseurs - en ce sens que ses ingénieurs ne veulent pas attendre et envisagent de procéder dans la décennie aux premiers tests avec une puissance (modeste) de 20 kilowatts d'énergie solaire transmise à la terre.
PETIT HISTORIQUE DES RESSOURCES ENERGETIQUES DE NOTRE PLANETE
Pourquoi cet engouement soudain pour l'énergie solaire ? Il est intéressant de rappeler succinctement la situation des ressources énergétiques de la planète:
La diminution inéluctable des réserves d'énergie non renouvelable, tel le pétrole, même si l'on découvre régulièrement de nouveaux gisements.
L'accroissement continuel des coûts d'exploitation des énergies non renouvelables place un grand nombre de pays, n'ayant pas encore atteint le développement nécessaire pour améliorer notablement la situation sociale et économique de leurs populations, dans une situation de déficit financier continuel en termes d'accès aux ressources énergétiques indispensables pour accéder à ce développement.
Les problèmes de stockage des déchets nucléaires et le CO2 émis par le charbon n'en font pas des sources d'énergie sécurisantes pour l'avenir de la planète.
La part des énergies renouvelables restera toujours modeste, évaluée entre 5 et 15% de la totalité des besoins. Les innovations et les recherches en matière d'adaptation pour trouver les ressources, que ce soit les éoliennes terrestres ou en mer, les centrales hydroélectriques sous marines (récupération cinétique des mouvements des vagues ou des courants) ou tels projets hyperboliques comme la création de 10.000Km² de panneaux solaires dans le Sahara - tous ces projets ne procureront pas les ressources suffisantes pour remplacer dans le futur l'équivalent des ressources issues des réserves actuelles d'énergie non renouvelable. Les difficultés de stockage de l'électricité produite présentent aussi un casse-tête permanent pour les ingénieurs.
La demande des pays en voie de développement est croissante, exponentielle, avec l'accès aux biens de consommation d'une part de plus en plus importante de leurs populations. Ces biens de consommation alignés sur ceux des sociétés occidentales sont hyper consommateurs en énergie, énergie qu'il faudra bien chercher partout où elle peut se trouver . . . même dans l'espace.
L'ENERGIE SOLAIRE SPATIALE ET L'ECONOMIE
L'énergie solaire spatiale est par définition une énergie renouvelable avec l'avantage d'être disponible en permanence quant au faisceau micro-ondes (cf. plus loin dans le texte) . L'exploitation de l'énergie du soleil, venue de l'espace, est envisagée par les grandes compagnies planétaires du domaine de l'aérospatiale - L'énergie solaire a l'avantage de pouvoir être distribuée (délivrable) partout sur la planète, plus chère, mais nécessite au départ de gigantesques investissements, lesquels sont rédhibitoires pour les pays les plus pauvres, ne disposant pas de ressources financières à mobiliser pendant des décennies avant de les voir se rentabiliser et d'autre part leur basse notation nationale les exclut des fonds d'investissements internationaux des banques privées ; seules leur restent les aides du FMI, de la Banque européenne ou d'autres catégories d'aides internationales.
Mais les aides, comme celles du FMI, exigent encore plus d'économies de la part de ces états. Malheureusement cela passe par d'avantages de privation de leurs populations, qui sont déjà, pour 40 % des pays de la planète, en dessous du seuil de pauvreté. On voit bien que les enjeux sont tels que le " casse-tête de l'aide humanitaire " ne trouve pas de solution toute-faite.
Quid : Comment une énergie plus chère pourrait-elle rentrer dans un plan d'aide internationale, et ce, même par l'entremise d'établissements privés ?
Et bien, il est toujours plus aisé de faire un plan de compte d'exploitation hors investissement, sachant que les montants nécessaires à un financement conséquent sont hors de portée financièrement pour certains pays, un tel montant d'endettement (avec un crédit à l'investissement au taux pénalisant) aboutit trop souvent à un rééchelonnement de la dette dont l'échéance est sans cesse reportée devant les difficultés économiques auxquelles est confronté le pays emprunteur.
Montage théorique d'investissement et d'exploitation conjoints pour les pays en voie de développement
L'exploitation de la ressource fournie par l'énergie solaire, pour un pays démuni de ressources financières suffisantes, pourrait se présenter sous deux montages financiers et d'exploitations conjoints :
Le premier : Les montants financiers de l'investissement selon la décision d'engagement des organismes prêteurs dans le cadre de l'aide aux pays en voie de développement ; par exemple en références aux critères d'attribution des aides habituellement admis dans les différentes situations économiques.
Le deuxième : L'élaboration d'un compte d'exploitation spécifique pour chaque pays concerné, lequel compte serait scindé en deux parties :
- La première partie représentant la prise en charge, par le pays bénéficiaire du projet, des coûts réels d'exploitation, à la condition préalable que ces coûts évalués soient supportables pour l'économie du Pays.
Les sociétés d'audit internationales pourraient définir l'ensemble des paramètres requis d'exploitation.
- La deuxième partie étant dévolue au remboursement des investissements initiaux en rapport avec l'écart de trésorerie des finances du pays (lorsque les fonds souverains sont constatés positifs ou sous une autre forme d'évaluation) au terme de chaque exercice du pays bénéficiaire. Etant entendu que les montants de remboursement seraient pondérés en fonction des besoins économiques immédiats du pays.
Les grandes organisations internationales, telle le FMI, évalueraient annuellement la quote-part à rembourser . . . ou à ne pas rembourser.
DEUX POSSIBILITES DE FOURNIR DE L'ENERGIE SOLAIRE SONT ACTUELLEMENT ETUDIEES :
A partir des tests et essais ayant prouvé que la diffusion sur longue distance est opérationnelle, sous la forme de faisceau micro-ondes ou sous celle de faisceau laser.
- Test réussi de transmission de micro-ondes sur longue distance : Record mondial en 2008 à Hawaï réalisé par John Mankins et son équipe : 20 watts transmis sur 148 Km de l'émetteur au récepteur.
- Nombreuses réalisations du laser comme armes de grandes portées (plusieurs kilomètres), testées et validées dans plusieurs pays, et parallèlement des recherches et mises au point ont aussi été menées avec succès dans le cadre d'applications civiles pour la transmission d'énergie par faisceau laser.
Deux possibilités s'offrent aux ingénieurs pour la récupération dans l'espace de l'énergie solaire recueillie par panneaux solaires (photovoltaïques) et transmise par faisceau de micro-ondes (longueur d'ondes radio de 15 cm, la même que celle d'un four domestique à micro-ondes), ou par faisceau laser (longueur d'ondes infra-rouge de 1,5 micromètre), à savoir:
1- Centrale spatiale solaire à faisceau de micro-ondes
1-a. Avantages de la transmission par faisceau de micro-ondes :
Traverser les nuages sans perte d'énergie avec une transmission possible sur toute la planète.
Transmission réussie de 20 watts par faisceau micro-ondes sur 148 Km
1-b. Inconvénients de la transmission par faisceau de micro-ondes :
La longueur d'onde très large des micro-ondes nécessite une antenne émettrice du faisceau micro-ondes dans l'espace de très grande dimension, lequel faisceau doit être réceptionné au sol par un ensemble d'antennes réceptrices de dimensions 10 fois plus grandes ! . Par exemple pour une puissance délivrée jusqu'à la Terre de 1GaW, la surface au sol pour les récepteurs photovoltaïques devrait couvrir une zone de 10 km de diamètre pour une antenne émettrice dans l'espace de 1 km de diamètre.
Installation à 36 000 Km de la terre d'une station solaire avec plusieurs jeux de panneaux miroir primaires réfléchissant la lumière solaire vers des miroirs secondaires (environ 2000 tonnes), lesquels la concentrent vers une structure composée de 900m² de panneaux solaires et d'antennes micro-ondes émettrices (environ 8000 tonnes), l'ensemble devant fournir une puissance théorique de l'ordre du gigawatt.
10 000 tonnes pour une centrale d'un gigawatt requièrent le lancement de l'équivalent de 1000 fusées Ariane V.
Le CNES (Centre National d'Etudes Spatiales) estime que le coût du lancement devrait être divisé par 10 ou 100 pour qu'un semblant d'équilibre économique soit envisagé lors de la conception d'une centrale solaire d'une telle ampleur, ce que ne désespère pas d'obtenir les ingénieurs, mais pour un futur pas si proche, à partir de 2030.
L'autre difficulté est la maîtrise dans l'espace d'une structure d'une telle dimension composée d'éléments de vaste dimension (panneaux solaires (1km de diamètre, miroirs et condensateurs).
2 - Centrale spatiale solaire à faisceau laser - LE CHOIX D'ASTRIUM -
2-a. Avantages de la transmission par faisceau laser :
La longueur d'ondes du faisceau laser est 100.000 fois plus petite que celle du faisceau micro-ondes : Laser, longueur d'ondes infrarouge de 1,5 micromètre ; Micro-ondes, longueur d'ondes radio de 15 cm. Cette longueur d'ondes considérablement réduite n'exige pas d'antennes aux dimensions excessives.
Les acquis technologiques d'Astrium dans la transmission laser de l'espace vers la terre
- Pour franchir le cap d'un faisceau d'une puissance supérieure à un Kilowatt produit de l'espace, les ingénieurs d'ASTRIUM progressent régulièrement avec leur filiale CILAS et aussi grâce aux travaux de l'université de Limoges- Le télescope scientifique Herschel, placé en orbite en 2009, comme le souligne Robert Lainé Directeur technique d'Astium, témoigne des acquis technologiques d'Astrium pour la fabrication de miroirs de 3,5 mètre de diamètre, ce type même de miroirs devant servir, dans l'espace, à la focalisation d'un rayon laser vers la Terre.
Comme pour le faisceau micro-ondes, ce sont des panneaux photovoltaïques au sol qui réceptionneront l'énergie solaire, mais ceux-ci sont plus performants et plus simples puisque ne recevant qu'une longueur d'onde infrarouge au spectre réduit, avec un rendement pouvant atteindre 80 % au lieu des 40% des panneaux solaires traditionnels
Prenant le problème " énergie solaire - espace - transmission terre " à rebours quant aux dimensions, les ingénieurs d'ASTRIUM ont choisi de débuter avec un projet de dimension modeste au départ, mais réalisable à très court terme, dans la décennie à venir, et se donnant la possibilité d'une " montée en puissance " continue sans les à-coups de projets grandioses, lesquels sont soumis aux progrès de la science, mais aussi aux échecs répétitifs dans l'attente d'une réussite pas toujours assurée ( Voir les abandons successifs des grands projets de la NASA, les progrès technologiques attendus pendant des décennies ayant chroniquement manqué au rendez-vous).
Les ingénieurs d'ASTRIUM se sont-ils montrés pragmatiques dans leur conception de leur Station spatiale solaire par faisceau laser en envisageant, la fourniture d'énergie électrique solaire dans les endroits les plus inaccessibles, à savoir : les territoires ensoleillés de la planète où se concentrent justement la majeure partie des pays en voie de développement ou dans l'attente de parvenir à ce statut ?
Ils n'ont pas mis à l'écart pour autant les besoins de la région européenne, la méditerranée et sa façade maghrébine faisant partie des régions ensoleillées toutes proches de l'Europe et déjà abondamment fournies en vecteurs de toutes sortes, transporteurs d'énergies diverses vers le continent européen.
2-b. Inconvénients de la transmission par faisceau laser :
L'inconvénient principal de la transmission par faisceau laser est que celui-ci ne traverse pas les nuages, d'où l'impérative nécessité d'installer la station réceptrice (panneaux solaires photovoltaïques de rendement 80% avec les ondes infrarouge du laser) dans des régions avec un taux d'ensoleillement avéré.
Cet article vous est fourni en cooperation avec le blog Euro-Loyalty que vous pouvez retrouver ici.