Vue d'artiste du nEUROn © Dassault Aviation - A. ErnoultNous savons que l’Inde est un des marchés les plus dynamiques du moment. Les grands industriels du monde entier se cassent les dents depuis des années alors que les Indiens passent des commandes qui enchanteraient n’importe quelle armée du monde. Le fameux appel d’offres MMRCA (Medium Multi-Role Combat Aircraft) est toujours en cours que déjà les militaires indiens pensent plus loin. C’est ainsi qu’une demande assez surprenant vient d’être rendue officielle : l’Inde souhaite acquérir des drones de combat furtif.

Nous n’en sommes qu’à une simple demande d’information mais l’heure en est déjà à se demander qui pourra bien répondre à un tel appel d’offres. Les UCAV (Unmanned Combat Air Vehicle) ne sont pas légion et aucun n’est en service dans des forces armées.

 

 

Une demande d’information internationale.

New Delhi vient de lancer une demande d’informations internationale en vue d’éventuellement acquérir des UCAV. Ces drones de combats ne sont pas nombreux mais l’Inde interroge désormais des industriels en Europe, en Israël en Russie et aux Etats-Unis.

La mission de ces drones serait d’épauler les moyens actuels et futurs de l’IAF (Indian Air Force). En ligne de mire officielle, la lutte contre le terrorisme dans le Cashmere et le Jammu proches de la frontière avec le Pakistan.

Les détails techniques ne sont pas encore bien clairs mais New Delhi aurait d’ores et déjà demandé que les engins soient propulsés par deux réacteurs. Un fait étonnant alors que rien sur le marché ne correspond à cette attente. Aussi, ils faudra que les drones aient une signature infrarouge minime, des contre-mesures électroniques ou encore des systèmes de guerre électronique de dernière génération. Au-delà, l’UCAV devra afficher des propriétés furtives importantes. Il devra aussi être capable de voler à haute altitude avec un rayon d’action supérieur ou égal à 500 miles nautiques (925 kilomètres). Enfin, l’IAF souhaite que le drone de combat furtif soit capable d’emporter de l’armement de haute précision au sein d'une soute interne.

Aeroplans - Boeing X-45A

Les futurs drones de combat devront être réutilisables. Les appareils actuellement en service dans l’armée indienne ne le sont pas. Leurs remplaçants devront donc agir comme des avions de chasse plus conventionnels. La durée de vie de l’UCAV devra être supérieure à 20 ans et il devra être doté d’une avionique moderne.

Aeroplans - Vue d'artiste du Predator C/Avenger

Qui peut répondre à un tel appel d’offres ?

Dans un avenir plus ou moins proche, un comité devrait être créé pour faire le tri dans les différentes offres que l’IAF recevra de part le monde. Il sera ensuite en chargé de mener les campagnes d’essais sur le terrain. Mais qui sont les prétendants à un tel contrat ?

Comme nous le disions, peu d’industriels peuvent se vanter d’avoir un UCAV dans leur catalogue. Et encore, tous sont encore des démonstrateurs. Même le Predator C/Avenger fabriqué par General Atomics n’est pas encore au point et pourtant, l’avance prise par les Américains dans le domaine des drones n’est pas un secret. Son premier vol eut lieu en avril 2009 et il sera motorisé par un réacteur Pratt & Whitney Canada PW54B (le même que celui des Cessna Citation XLS). Entre autres caractéristiques, sa longueur est de 13,5 m pour une envergure de 22 m. Son empennage est en V Aeroplans - Northrop Grumman X-47 Pegasuscontrairement aux autres Predator qui possédaient un empennage en V inversé.

En dehors du Predator C Avenger, Northrop Grumman présentera surement son X-47B. Le Pegasus est un démonstrateur pour une prochaine génération de drones de combat. Il est peut-être le premier représentant d’une catégorie de drones que l’on appellera les UCAS. Cette plateforme sera particulièrement adaptée aux contextes multi-missions et pourra notamment être emportée sur porte-avions.

Pour en finir avec les appareils américains, le Phantom Ray de Boeing pourrait aussi être proposé. Nous faisions récemment le point sur ce programme qui s’annonce très ambitieux. Selon Darryl Davis, président de Boeing Phantom Works, les tests de roulage au sol devraient débuter cet été et le premier vol est prévu pour le mois de décembre de cette année.

 

Aeroplans - Le premier vol entièrement autonome de l'AVE D, le 30 juin 2008 © Dassault Aviation - M. BonnaireCôté russe, seul le Mikoyan-Gourevitch Skat nous parait apte à concourir. Dévoilé pour la première sous forme de maquette lors du salon aéronautique russe MAKS-2007, la « raie » ne donne pas beaucoup de signes de vie. Un prototype avait été annoncé pour 2009 et pourtant il ne vole pas encore. De plus, pour suivre la réglementation russe en vigueur, ce premier prototype devra être piloté. Enfin, l'avionneur star du moment en Russie, Sukhoï doit aussi présenter un UCAV sans que l'on n'en sache plus.

Nous terminerons avec l'Europe qui parait tout à fait en mesure de répondre à cet appel d'offres encore hypothétique. Le nEUROn dont le maitre d'œuvre est Dassault Aviation continue d'avancer dans son programme de conception. L'UCAV est certainement le plus abouti de l'offre européenne actuelle. Non pas qu'il soit terminé, à partir de 2012, le démonstrateur technologique en-cours de conception réalisera le programme d'expérimentation prévu. Il pourra néanmoins s'appuyer sur les premiers pas fait par l'aéronef de validation expérimental (AVE) "Petit Duc" qui préfigurait les futurs drones de combat de Dassault Aviation. L'engin correspond tout à fait aux Aeroplans - EADS MAS Barracudaattentes affichées par l'IAF en dehors de la capacité bi-réacteur. Que ce soit en terme de furtivité, d'armement et bien-sûr d'avionique, le nEUROn a tout pour plaire aux Indiens. De plus, en ces temps de disette budgétaire, une commande indienne ne ferait pas de mal à la conception de l'appareil.

Cette remarque est aussi valable pour le Barracuda d'EADS Military Air Systems. Le démonstrateur germano-espagnole a effectué son premier vol en avril 2006 mais ce prototype s'est abîmé en mer peu avant l'atterrissage près de Murcia le 23 septembre 2006. Ce coup dur ne semble pas avoir mis un terme définitif au programme mais EADS est aussi connu pour son travail sur l'Advanced UAV ou Talarion qui pourrait lui-aussi trouver une version armée. Cependant, le Talarion ne semble pas adapté pour répondre aux besoins indiens du moment notamment en ce qui concerne la furtivité.

Aeroplans - Démonstrateur du Taranis lors de RavenA priori le Taranis développé par BAe Sytems aurait aussi ses chances. Le drone présenté en ce mois de juillet par l'armée britannique ne volera pour la première fois qu'en 2011. Mais le Taranis aura notamment pour lui son très long rayon d'action, inédit selon BAe Systems. Nous consacrerons bientôt un article complet sur cet engin. Il bénéficiera tout comme le nEURON d'un programme en amont performant et dénommé Raven. Depuis 2003/2004 sur la base de Warton, les premières technologies du Taranis sont en test.

Seule zone d'ombre au tableau, on notera qu'Israël serait elle-aussi consulté pour la production d'UCAV furtif avec une baie d'armement interne. Cependant, le pays n'est pas connu pour ses drones de combat. En dehors de son drone kamikaze Harop auquel nous consacrerons bientôt un article, nul projet ne semble émerger des entreprises israéliennes. Mais l'Inde et Israël tisse une relation de confiance dans l'aéronautique. Les drones présents en Inde sont déjà issus d'une coopération israélo-indienne.