Le plus grand best-seller de tous les temps continue de se vendre et pas seulement sur le marché de l’occasion. Encore en Égypte, le chasseur fabriqué par Lockheed Martin pourrait se vendre à 24 exemplaires. Un contrat qui s'élèverait à 3,2 milliards de dollars selon l’administration Obama qui reste le plus grand marchand d’armes de la planète. Alors que la vague médiatique s’efforce de parler de chasseurs plus récents comme le F-22, le F-35, le Rafale ou l’Eurofighter, on oublie que ce marché mondial reste dynamique. Un marché qui vient parfois interférer avec celui des chasseurs de quatrième génération +. Ce fut le cas pour le Rafale au Maroc.
F-16 contre Mirage, un duel épique et à haut risque.
L’histoire du General Dynamics F-16 Fighting Falcon remonte à 1965 avec un premier vol en 1976. Depuis, l’appareil a subi énormément d’évolutions et en est à sa cinquième génération. Ainsi, de nombreuses séries ou “blocks” ont été produits entre 1980 et aujourd’hui. Le block 60 est aujourd’hui la référence avec des versions uniquement à l’export F-16E (monoplace) et F-16F (biplace) puisque l’armée américaine n’en achète plus. Pourtant, ces appareils seront encore en service dans ses forces jusqu’en 2025. L’avion s’est vendu à plus de 4400 exemplaires dans prêt de 25 pays ce qui en fait l’avion de référence du vingtième siècle. En dehors de sa réponse aux besoins des forces armées américaines et son potentiel à l’export, le F-16 devait également prendre en chasse la concurrence française et ses Mirage.
De son côté, le Mirage 2000, qui se trouvera souvent face au F-16, est un projet commencé à la fin des années 1970 par Dassault Aviation. Financé sur des fonds propres puis avec des aides d’État, l’appareil va révolutionner l’industrie aéronautique française. Mis en service en 1984, le Mirage 2000 sera principalement utilisé par l’armée de l’air française qui en a reçu 315 exemplaires. Mais c’est aussi un très bon succès à la vente puisque 286 autres ont été exportés vers 8 pays différents : Brésil, Égypte, Grèce, Émirats arabes unis, Inde, Pérou, Qatar et Taïwan. À l'origine développé pour être un avion d'interception et de supériorité aérienne, le Mirage 2000 fut ensuite décliné en différentes versions : les Mirage 2000B, C, 5, mk2, 9, M, D, H et E.
Grâce à ses capacités, le pouvoir d’influence des États-Unis et son coût unitaire relativement faible puisqu’avoisinant les 20 millions de dollars, le F-16 prendra le pas sur le Mirage. Reste que l’avion français sera suffisamment rentable pour permettre le développement du Rafale assurant ainsi la pérennité de l’industrie tricolore.
Chez Dassault, on a préféré stopper les lignes de production du Mirage 2000 en 2006. Ironie du sort, c’est le contrat indien qui a eu raison du chasseur de Dassault Aviation. L’Inde qui exploite 46 Mirage 2000EH et 13 Mirage 2000TH négociait déjà avec la France en 2006 en vue d’acquérir 126 avions de combat pour remplacer ses vieux Mig-21. À l’époque, Charles Edelstenne et Jacques Chirac souhaitaient fournir des Mirage 2000 supplémentaires pour un montant de 7 milliards de dollars. Suite à cet échec et au désir de New Delhi de lancer un appel d’offres international, Dassault avait alors décidé de l´arrêt définitif de la production de cet avion de combat, que le Rafale avait déjà commencé à remplacer.
Le groupe décidera cependant et en toute logique de conserver le dispositif nécessaire à la maintenance et la rénovation de ces appareils. Un dispositif qui sert toujours puisque depuis l’année dernière la rénovation des 10 Mirage 2000 P et des 2 Mirage 2000 DP de la force aérienne péruvienne est en cours de discussion. Cette mise à niveau des Mirage est évaluée à 140 millions de dollars, soit 100 millions d’euros.
De son côté, le F-16 va donc décrocher un nouveau contrat en Égypte. Le Caire et Washington ont signé le 24 décembre ce contrat qui permettra à l'Égypte de rajeunir sa flotte d'avions de chasse. Outre ces appareils, le contrat porte sur des armes associées, des équipements de soutien, des logiciels et d'autres services. Le tout pour un montant de 3,2 milliards de dollars pour des appareils livrés à partir de 2012. L'Égypte utilise des F-16 depuis 1982 et son armée de l'air en a déjà reçu 220. Bizarrement, ce contrat avait été gelé par l'administration Bush qui y voyait une manière de protester contre les atteintes aux droits de l'homme et à la démocratie en Égypte. Il semblerait que l’administration Obama voit les choses différemment.
Alors que le Mirage n’est plus produit depuis maintenant quatre ans, on se demande si l’arrêt de la production de cet appareil fut un choix judicieux. Aujourd’hui, l’industrie française n’affiche une offre composée que d’un seul appareil, le Rafale. Sans aucun client ferme connu à l’exportation l’avion est peut-être trop en avance sur son temps et coûte surtout cher. Une offre alternative et moins évoluée aurait peut-être encore ses chances.
Le F-16 fait toujours partie de l’offre actuelle.
Si l’on peut vite penser que le F-16 n’a rien en commun avec un Rafale, un Eurofighter, un JAS-39 Gripen ou un MiG-35, il continu de prendre des parts de marchés. L‘exemple le plus parlant côté français sera surement celui du Maroc. En 2008, le gouvernement américain officialisé la vente de 24 chasseurs F-16C/D munis d’un équipement sophistiqué pour un prix qui atteindrait les 2,4 milliards de dollars. Un revers sérieux pour ce qui aurait pu être la première vente de Rafale à l’étranger. Même si cet échec peut être largement imputé au camp français, c’est bien le F-16 qui remportait la course.
S’il est clair que l’on ne peut techniquement pas comparer un F-16 aux appareils actuellement en course dans les grands appels d’offres internationaux, force est de constater que le F-16 a encore de beaux jours devant lui. Bon marché et largement rodé, l’appareil s’adresse à une clientèle différente, mais nombreuse. En plus, l’appareil a participé à de nombreux conflits, en particulier au Moyen-Orient, dont les plus notables sont la guerre du Liban (1982), la guerre en Afghanistan (1987), l’opération Tempête du Désert, la guerre des Balkans, et la seconde guerre d’Afghanistan (2001). Une excellente carte de visite qui devrait tourner encore quelques années.
Michael Colaone.
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