Nous vous parlions le 1er Janvier de l'annonce faite par le gouvernement libanais et par le service de coopération technique et militaire fédéral russe de la donation de 10 chasseurs de combat MiG-29, l'affaire prend aujourd'hui une autre tournure puisque le Liban a finalement reporté la visite de sa délégation officielle conduite par le général Michel Menassa prévu pour le mois dernier. A la place, c'est un groupe d'experts qui a était envoyé à Moscou de manière à vraiment prendre conscience de l'état des 10 appareils promis par la Russie. Selon certaines sources, un tiers des MIG-29 de la flotte russe sont trop rouillés pour décoller sans s'écraser. Un problème qui sera finalement remonté vers les libanais qui tiennent aujourd'hui à évaluer les appareils avant d'envoyer leurs pilotes pour un stage de huit mois.
Ainsi la renaissance de l'armée de l'air libanaise est toujours en suspend. Après la vente de ses Mirage III au Pakistan en 1999, les forces armées de ce pays ne sont guère impressionnantes. De plus, les problèmes rencontrés sur les avions d'entrainement Hawker Hunter commencent à devenir problématiques. Six d'entres eux ont étaient aperçus lors de la fête nationale du 22 novembre 2008 mais ils ne sont plus considérés comme opérationnels. Le Liban ne possède ainsi plus de capacité opérationnelle pour former ses pilotes hormis des échanges avec des pays amis comme les Emirats Arabes Unis ou maintenant la Russie. Ce manque d'appareils d'entrainement pourrait néanmoins trouver une issue heureuse. En effet, le pays est en discution avec les Emirats Arabes Unis et l'Arabie Saoudite. Dans le cas des forces émiraties, céder des appareils aujourd'hui reviendrait en remettre en cause ses propres capacités. Peut-être y a-t-il un marché potentiel derrière ces discutions et qui viserait à fournir aux Emirats de nouveaux avions ? En revanche, l'Arabie Saoudite alignant pas moins d'une cinquantaine d'appareils pourrait bien être en position de fournir le Liban.
A force de diversifier ses sources d'approvisionnement en matériel militaire, le Liban s'expose de plus en plus à des coûts supplémentaires dont il n'a pas les moyens. L'acquisition prochaine des MiG russes est d'ailleurs considérée pour beaucoup d'observateurs comme une erreur que ce soit pour la formation des pilotes ou pour les coûts de maintenance. De plus, une telle flotte de MiG-29 reste discutable face à Israël toute proche. En effet, même équipées de cette dizaine d'avions de combat, l'armée de l'air libanaise ne peut pas espérer survivre longtemps face au nombre et à la qualité des avions de Tsahal. N'oublions tout de même pas que cet « appel d'offres » devait répondre prioritairement à un besoin pour des frappes air-sol suite aux événements liés à la guerre contre le groupe Fatah al Islam. Il s'agirait aussi de faire respecter l'espace aérien libanais actuellement sous contrôle hébreux.
Le réveil de l'armée de l'air libanaise n'est pas encore pour demain. Israël voit toujours d'un très mauvais œil cet arrivage de matériel militaire qui pourrait être utilisé contre elle. Après avoir échoué, les américains semblent se limiter à fournir du matériel encore plus vétuste que les MiG-29 russes et ce, sans compter leurs liens avec l'Etat juif. La France elle ne semble pas de la partie. Pourtant n'avons-nous pas parlé de Mirage III dans ce qui est traditionnellement une sphère d'influence française ?
En tout cas pour les russes l'équation est à la fois claire et multiple. Tout d'abord dans la région, le gouvernement de Dimitri Medvedev veut probablement faire comprendre à Israël qu'ils n'ont pas du tout apprécié l'aide militaire de Tsahal à la Géorgie. Mais cette démarche peut également s'inscrire dans un contexte plus grand. Le nouveau président américain Barack Obama souhaite engager un fort processus de négociations au Moyen Orient. Le Kremlin rappelle en agissant ainsi que les Etats-Unis ne pourront pas se passer des russes. Une Amérique qui craint par ailleurs que ces armes tombent dans les mains du Hezbollah. Troisième et dernière possibilité, il se pourrait que la Russie joue directement au chat et à la souris avec la France. Tout d'abord en s'opposant aux déclarations du président Sarkozy sur la disparition des zones d'influence en Europe. S'il en est ainsi, la Russie fait comprendre qu'il ne doit donc plus avoir de chasse gardée pour la France au Moyen Orient. A l'inverse, on ne peut exclure que la Russie aille dans le sens que voudrait la France pour muscler l'armée libanaise. Pour consolider son Etat, la France ne peut fournir directement des armes sans prétendre à une riposte israélienne ou américaine. Finalement, il se pourrait bien que ce soit les intérêts français qui continus de primer au pays du Cèdre.
Notre article précédent : Des MiG-29 pour accroitre sa puissance