Dernier né de la bataille que mènent Airbus et Boeing pour le contrôle des cieux mondiaux, l’A350 viendra faire face au B787 Dreamliner à l’horizon 2013. Alors que le rival américain a effectué son premier vol en décembre dernier, l’A350 s’annonce comme un succès commercial pour Airbus. Il aura en tout cas moins souffert que le B787 des aléas de la mise en service de nouveaux matériaux.
Comme son rival d’outre-Atlantique, l’A350 rivalise par les innovations qu’il emportera à son bord. Utilisation massive de nouveaux matériaux et de technologies de pointe, le futur long-courrier européen sera le prochain grand évènement d’Airbus après la mise en service de l’A380. Si des retards paraissent déjà inévitables, ils correspondent à un planning initial ambitieux. Mais pour l’instant, ni Airbus ni la compagnie de lancement Qatar Airways ne semblent inquiets et la date du premier vol est maintenue à la mi-2012.
L’A350 maintient son plan de vol malgré de nombreux défis.
Le lancement d’un nouvel avion de ligne n’est pas chose aisée. Qui plus est en Europe, les défis à relever ne manquent pas, surtout quand il s’agit d’un projet aussi ambitieux que l’A350 XWB (extra-large body). Si l’avion s’est fait plutôt discret ces derniers temps, quelques informations ont fusées notamment suite à la dernière réunion entre l’avionneur, ses clients et ses clients potentiels.
Si le programme A350 commence à prendre du retard, le calendrier de livraisons est pour le moment maintenu. Ceci alors que Tommas Enders déclare déjà qu’Airbus va avoir du mal à respecter son calendrier. Cependant, afin de faire le maximum pour tenir les délais, Airbus va notamment réaffecter des ingénieurs travaillant sur l’A380 vers le programme A350. Malgré tout, le retard cumulé atteindrait les trois mois.
En cause, des problèmes intervenus lors de la conception de la structure en fibres de carbone. Ils reportent ainsi l’assemblage final du premier A350-900 au troisième trimestre et le vol inaugural au milieu de l’année 2012. En fait, c’est le programme d’essais qui absorberait le retard pris dans la conception. Il présenterait suffisamment de marge pour absorber l’impact de ce léger retard. Il devait en effet initialement durer quinze mois, ce que la compagnie de lancement Qatar Airways juge d’ailleurs très long. Les douze mois désormais prévus sont la norme de l’industrie.
Beaucoup d’innovations pour ce nouveau fleuron européen.
Comme vous pouvez le remarquer, c’est l’innovation qui est responsable des premiers légers retards dans la conception de l’appareil. Mais quoi de plus difficile à anticiper que l’innovation ? Après tout, pour l’instant il n’y a pas le feu au lac contrairement aux difficultés rencontrées dans la conception du B787 de Boeing.
S'il a fallu octroyer davantage de temps au processus de validation de la structure, c'est parce que le design ne peut être amélioré après le lancement de la production des pièces lorsqu'il s'agit d'éléments en composites. En attendant, les usines de Nantes ou de Stade en Allemagne et Illescas en Espagne mettent les bouchées doubles. Ces usines travaillent effectivement en amont (entre 1,5 et 2 ans) de l'assemblage qui se fait lui à Toulouse. A Nantes, on travaille dur pour livrer les grosses pièces de structure du futur long-courrier attendues au premier trimestre 2011. C'est de cette usine que sont déjà sortis les quatre panneaux en fibre de carbone destinés aux premiers appareils MSN 1 et MSN 2.
Après les retards à répétition du superjumbo A 380, pas question pour Airbus de décevoir les 33 compagnies qui ont commandé 530 exemplaires de ce long-courrier de nouvelle génération. L'A350 comptera 53% de matériaux composites, et même 80% hors systèmes, contre 45% pour l'A380. «Le composite permet non seulement de diviser par trois le poids des pièces mais aussi de réduire de 30% le bruit en sortie du moteur grâce à un panneau composite réalisé en un seul bloc. Une expertise unique au monde», souligne Michel Plantard, responsable de la production.
Au rang des innovations présentes sur l'A350 XWB, on comptera aussi d'autres exemples. Ainsi, Airbus sera le premier avionneur à recourir à l'identification par radiofréquence pour suivre la maintenance des appareils. L'utilisation de puces sans contact RFID baptisées « FLYtag » va donc faciliter la maintenance des avions. " Sur cet avion, 3 000 pièces seront équipées d'une puce RFID dès leur fabrication chez nos fournisseurs", explique Paul-Antoine Calandreau, responsable du projet chez Airbus. Cette puce permettra d'assurer leur suivi lors des processus de production et d'assemblage. Mais la grande nouveauté réside dans le fait qu'elle sera utilisée tout au long de la vie de l'appareil. Les tags (étiquettes) contiendront des informations d'identification ainsi que l'historique complet de l'entretien des pièces les plus critiques de l'avion, ce qui permettra d'optimiser les opérations de maintenance, de réparation et de révision », explique Paul-Antoine Calandreau, responsable du projet chez Airbus.
Maintenir le cap pour ne pas rater le programme.
Pour Airbus, ces prochaines années il s'agit de ne pas rater l'A350, l'A380 et la relève de l'A320. Ces trois programmes sont au centre de son activité. Ainsi, même s'il a été parfois difficile de s'entendre sur le financement du programme A350 XWB estimé à 10 milliards d'euros, c'est maintenant chose faite. La France est ainsi devenue le principal actionnaire autre qu'Airbus dans ce programme qui est déjà attendu comme un gros succès commercial. L'Allemagne a finalement reçu les garanties qu'elle attendait d'EADS pour financer le programme. On pense notamment la production de la future famille des A320. Enfin, l'Espagne est aussi rentrée dans le rang après une période d'incertitude.
L'appareil sera assemblé à Toulouse dans un hangar flambant neuf qui doit être livré en 2011 : «L'enjeu est important puisque l'A350 est appelé à représenter de 30% à 35% de l'activité d'Airbus ». A noter qu'Airbus continue de développer ses efforts en matière d'écologie avec cet éco-batiment. En effet, la filiale d'EADS va chauffer son usine au bois. Elle a ainsi signé un contrat d'approvisionnement de 22.000 tonnes de déchets de bois par an avec une coopérative de Midi-Pyrénées, Cofogar. Ils alimenteront deux chaudières de six mégawatts. Ce projet souligne ainsi sa volonté de créer une « usine plus verte » et revendique une place « d'entreprise citoyenne » en soutenant la filière bois régionale. Mais ce n'est pas tout, notamment puisque l'usine sera couverte de 22 000 m² de panneaux photovoltaïques produisant 55% de l'énergie nécessaire au bon fonctionnement de cette dernière.
Enfin, le design de la version allongée de l'appareil, l'A350-1000, devrait être arrêté dans les prochains mois. La modification majeure à apporter chez Airbus concerne un allongement des bords de fuite de l'aile de 40cm, augmentant sa surface de 4%. Cela permettra à l'appareil de respecter les normes en matière de bruit et de vitesse en vol. Cette version doit rentrer en service en 2015.
A la mi-mai, 530 exemplaires avaient été commandé par 33 clients. L'A350 XWB est l'avion qui s'est le mieux vendu avant sa première livraison dans toute l'histoire d'Airbus.
Michael Colaone.
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