Alors que la compagnie britanique passe d'un bénéfice record (712 millions de livres) à une perte tout aussi historique (375 millions) en 2008, c'est une vaste opération de lobbying qu'elle met en œuvre pour profiter au maximum de l'accord de libéralisation des lignes transatlantiques et favoriser son rapprochement avec Iberia et American Airlines. Il faut dire que les britanniques voient un bon nombre d'opportunités au travers de cette affaire dont les enjeux se trouvent aussi bien en Europe qu'aux Etats-Unis, sans oublier Londres bien entendu.
Un lobbying actif auprès de Washington.
En ligne de mire le DOT (le ministère américain des transports) qui est l'organisme fédéral ayant la possibilité d'exonérer la compagnie des interdictions posées par les lois anti-trust américaines applicables dans notre situation. En effet, les trois compagnies que sont BA, Iberia et American Airlines veulent un rapprochement commercial qui pourrait faire économiser des sommes non négligeables surtout en ces temps difficiles pour les compagnies aériennes. Or pour le moment, les autorités américaines n'ont pas autorisées un tel rapprochement et c'est bien la raison qui pousse ces acteurs à mener une campagne de lobbying auprès du DOT.
En tout, ce serait environ 3 400 lettres qui auraient été rassemblées en faveur du rapprochement entre les trois compagnies. Sous la houlette du sénateur de l'Illinois Dick Durbin, les auteurs de ces lettres affichent tous un intérêt pour cette opération. 499 hommes politiques et officiels américains, 129 aéroports américains, 521 entreprises et petites entreprises, ainsi que 615 entreprises du secteur du tourisme et 365 associations et chambres de commerce seraient en faveur du projet. Or un tel soutient est un allié particulièrement important pour les trois compagnies alors même que le pays n'est pas en grande forme. L'opposition serait alors minimale à Washington si une autre compagnie aérienne britannique ne menait pas un lobbying inverse.
L'opposition de Virgin Atlantic.
Selon les dires de Richard Branson, un tel rapprochement serait dramatique pour sa compagnie et pourrait même y mettre un terme. Le milliardaire britannique s'est d'ailleurs lui-même rendu dans la capitale américaine pour défendre sa cause expliquant que la libre concurrence est certes une bonne chose pour le consommateur mais laisser trois de ses concurrents accorder leurs plans de vols nuirait à sa compagnie et donc à cette même concurrence. Rappelons tous de même que BA et AA sont les deux compagnies dominantes sur les liaisons transatlantiques au départ de Londres. Une liaison que Virgin voit comme une de ses plus importante alors qu'elle ne peut pas s'offrir autant de créneaux à Heathrow que ses rivales. Si ces deux compagnies avaient demain le droit d'accorder leurs prix, c'est cette même concurrence bénéfique qui serait remise en cause selon M. Branson.
Les grandes alliances.
Alors que les autres grandes alliances mondiales ont déjà obtenus ce genre d'accords, Oneworld est la seule à la traine. Si le soutient ne viendra évidement pas de Sky Team ou de Star Alliance, BA et les autres peuvent compter sur les autres compagnies telle que la Royal Jordanian ou Finnair. Coup de pouce médiatique ou soutient d'allégeance, ces deux compagnies se sont jointes aux officiels américains pour demander l'exemption des lois anti-trust. Nul doute que chacun y trouvera son compte puisque parait-il, l'union fait la force.
Reste alors l'Europe.
Ce rapprochement s'il devait avoir lieu devrait également recevoir l'aval des autorités européennes. A priori, les trois compagnies menées par BA partiraient du principe qu'un accord obtenu aux Etats-Unis serait le meilleur moyen de pression sur les européens. Reste néanmoins que les européens semblent plus concernés par les risques liés à ces accords. En première ligne les anglais qui comme nous l'avons dit sont particulièrement concernés par les démarches de Virgin Atlantic. Le spectre de la perte de cette compagnie et de toutes ses retombées économiques et sociales au profit de quelques synergies pour la compagnie nationale serait surement mal perçue. Ceci sans compter les actions qui ont dut être mises en place par les compagnies concurrentes (Air France, Lufthansa...) qui n'ont aucun intérêt à ce que les britanniques se développent. Si l'alliance One World peut soutenir la démarche de BA, AA et Iberia ce ne sera surement pas le cas de Sky Team et Star Alliance qui pourraient elles-aussi mener des opérations plus subversives.
Reste que ce rapprochement met bien en avant les pratiques de lobbying opérées par les grandes compagnies aériennes. Même si on est en droit de se demander si elles sont plus au service du consommateur ou des compagnies, les problèmes restent complexes et il y aura certainement un perdant. On ne parle plus en tout cas du rachat d'Iberia par BA. La compagnie espagnole aurait été jugée comme étant dans une posture trop fragile pour un rapprochement imminent. Mais l'affaire continuera surement une fois les turbulences actuelles passées pour Iberia et BA.