Mercredi matin, à 09h25 (heure de Paris), le sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) Le Terrible a procédé à un tir de missile stratégique M-51 depuis la baie d'Audierne, dans le Finistère. Le missile a volé pendant une vingtaine de minutes avant de s'abîmer dans l'océan Atlantique, à environ 2 000km de la Caroline du Nord.
Ce vol d'essai était placé sous la responsabilité de la Direction Générale de l'Armement, mais le Bâtiment d'Essais et de Mesures (BEM) Monge, de la Marine Nationale, était présent sur zone pour observer l'impact. Le missile ne transportait bien sûr aucune charge nucléaire.
Trois vols d'essais du M-51 avaient déjà été réalisés entre 2006 et 2008, tous depuis le Centre d'Essais des Landes, soit depuis un pas de tir, soit depuis une piscine. Cet essai était le premier effectué depuis un SNLE dans des conditions proches de l'utilisation opérationnelle.
Le nouveau missile français, développé sous maîtrise d'œuvre de EADS Astrium, devrait entrer en service opérationnel dès cette année, à bord du Terrible. Il deviendra le sixième missile de la Force Océaniques Stratégique (FOST), après le M-1, le M-2, le M-20, le M-4 et le M-45, ce dernier armant toujours nos SNLE à l'heure actuelle.
Avec une masse de cinquante tonnes, le M-51 a une portée d'au moins 8 000km, et pourra emporter au moins quatre têtes nucléaires MIRVées (c'est-à-dire pouvant atteindre des cibles différentes, indépendamment les unes des autres). Au début, les têtes seront des TN-75, utilisées actuellement sur le M-45, puis la nouvelle Tête Nucléaire Océanique (TNO) entrera en service pour la remplacer. Ce sera la première arme nucléaire française à n'avoir pas été testée.
Le développement du M-51 avait été lancé en 1998, et il aura donc fallu moins de huit ans à Astrium pour réaliser le premier vol, et environ douze ans pour arriver à un système opérationnel au sein des Forces armées.
Etant donné la complexité du missile, on peut sans hésitation le qualifier d'immense succès. Un succès à mettre en regard avec d'autres programmes d'EADS (tout le monde pense à l'A400M), qui connaissent des difficultés de gestion incomparables. Le MINDEF, Hervé Morin, a pu, pour une fois, annoncer sa « satisfaction » !
On regrettera cependant que, en France, on ne fasse pas plus de liens entre ce type de missiles et les lanceurs spatiaux. Russes et Américains utilisent depuis de nombreuses années leurs missiles stratégiques comme des petits lanceurs de satellites. Nous avions déjà fait état dans ce blog de la possibilité de convertir le M-51 en une petite fusée, mais aucun projet n'a jamais été lancé.
A l'heure du développement du petit lanceur européen VEGA, basé principalement sur la propulsion solide, on ne peut que regretter que les savoir-faire acquis avec le M-51 ne soient pas plus rentabilisés.
Nicolas Pillet.