La rumeur qui s’est vite répandue a été lancée par le ministre brésilien de la Défense, Nelson Jobim lui-même lors d’un déplacement à New York cette semaine. Selon lui, le choix brésilien pour moderniser sa flotte aérienne de combat serait imminent et pourrait intervenir sous une vingtaine de jours.
Mais cette décision qui revêt avant tout une dimension politique ne fait toujours pas l’unanimité au Brésil. Entre doutes et compétition, il faut rester prudent quant à l’avenir du chasseur français dans ce pays.
Les premiers à douter sont les militaires brésiliens. Leur relation avec le gouvernement de Luiz Inácio Lula da Silva est tendue. Une tension d’autant plus exacerbée depuis que le rapport technique de la FAB (Força Aérea Brasileira) a été écarté au profit d’un choix plus stratégique et politique.
Un des arguments des militaires brésiliens est de mettre en avant le prix du Rafale évalué à 6,2Md$. Le prix de 36 avions était originellement de 8,2Md$. En face, le F-18 affiche un prix de 5,7Md$ et le Gripen NG un prix de 4,5Md$. Voyant la fin arriver, Saab casse littéralement les prix pour sauver la production du Gripen. Le groupe suédois propose aussi une nouvelle version aussi virtuelle que le Gripen NG, le Sea Gripen.
Au-delà des militaires, c’est aussi le tissu industriel brésilien qui a besoin d’être rassuré. Mettant en avant l’argument de la souveraineté et de l’indépendance, ces industriels souhaitent aider le pays à s’affirmer en temps que puissance indépendante en Amérique latine. Embraer (qui représente 60 % du secteur aérospatial brésilien) et ses acolytes ne veulent pas laisser passer cette occasion. Pour cela, la vente de Rafale revêt un taux d’échanges de technologies sans précédent. Dassault et la France proposent ainsi un transfert quasi intégral pour la production du Rafale au Brésil. Un appareil qui sera produit sur le territoire national assurant ainsi de la création de nouveaux emplois.
Enfin, n’oublions pas que les deux pays développent leur coopération bilatérale depuis maintenant quelques années avec succès. Un accord qui est indiscutablement profitable pour les deux partis en présence. Outre la production de matériels au Brésil et la formation de main d'œuvre locale, les entreprises françaises travaillent efficacement avec leurs confrères brésiliens. De plus, n’oublions pas que l’offre française avait été assortie de l’achat d’une douzaine d’Embraer KC-390 pour l’armée de l’air française. Un contrat évalué entre 500 et 750M€ largement discuté en France, qui soutiendra encore plus la croissance d’Embraer.
Depuis le 30 janvier dernier, le Rafale est donné gagnant au Brésil. La presse rapportant que Luiz Inácio Lula da Silva et Nelson Jobim, avaient finalement tranché en faveur de Dassault. Un choix politique courageux qui devrait alors se concrétiser. Le spectre de changement de gouvernement commence de plus en plus à planer sur ce choix. En attendant, les manœuvres d’influences, de lobbying et de désinformations continuent. Le Rafale n’a cependant jamais était aussi proche du but.
Michael Colaone.